A l’heure où les Etats-Unis annoncent leur sortie de l’accord sur le nucléaire iranien et le retour des sanctions économiques contre l’Iran, il est temps d’agir pour protéger les entreprises françaises des sanctions secondaires extraterritoriales auxquelles elles sont exposées.
Outre des sanctions dites primaires visant principalement les « US person » (toute personne ou entité américaine ou toute personne s’y rattachant ainsi que toute personne se trouvant sur le territoire américain), les Etats-Unis ont annoncé le retour à terme des sanctions extraterritoriales secondaires. Ces sanctions interdisent aux « non-US person » de prendre part à toute opération dont la finalité serait de contourner une sanction primaire. En outre, il est interdit à toute entité américaine d’avoir un quelconque lien d’affaire avec les « non-US person » recensées par le gouvernement américain comme étant en infraction des sanctions. En contraignant ses sociétés à donner effet aux sanctions secondaires, le gouvernement américain fait de ses entreprises des auxiliaires permettant une réelle efficacité du caractère extraterritorial des sanctions.
Le cadre est pourtant en place. Le 22 novembre 1996, en réponse à l’adoption de deux lois américaines à portée extraterritoriale visant Cuba et la Syrie et la Lybie, le Conseil de l’UE a adopté le Règlement 2271/96. Il s’agissait pour l’Union de protéger les intérêts de ses ressortissants contre l’application extraterritoriale de ces lois en interdisant notamment de reconnaitre ou d’exécuter toute décision donnant effet à ces lois.
L’extension du Règlement n° 2271/96 aux sanctions contre l’Iran est manifestement une des pistes envisagées par la France, ainsi que l’ont indiqué MM. Bruno Le Maire et Jean-Yves Le Drian le 15 mai dernier à Bercy où ils recevaient une soixantaine d’entreprises françaises actives en Iran. Mais qu’on ne s’y trompe pas, le seul risque de se voir infliger une simple amende pénale par un tribunal français paraît inefficace à créer un réel aléa judiciaire pour les contrevenants étrangers. Aussi, si la France se résout effectivement à poursuivre pénalement la violation du Règlement européen de 1996, il conviendra d’assortir les éventuelles sanctions pénales de peines complémentaires, et notamment l’interdiction d’exercer en France ou le placement sous surveillance judiciaire.
Mais surtout, Bercy pourrait tirer parti des réflexions actuelles sur le contrôle des investissements étrangers. En effet, le Ministère de l’Economie a indiqué qu’il souhaitait renforcer le dispositif de contrôle des acquisitions étrangères en France. A cette occasion, on pourrait envisager d’ajouter un critère dans l’examen de l’autorisation d’une éventuelle opération d’investissement en France : le Ministère de l’Economie soumettrait entre-autres son autorisation sur une opération d’investissement étranger à un engagement de la part de l’investisseur de ne pas donner effet à des sanctions extraterritoriales secondaires.