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Finance décentralisée, par Stéphane Daniel, avocat associé, d&a partners, partenaire du Club des juristes

Finance décentralisée – La France à la recherche d’un cadre réglementaire

La finance décentralisée (DeFi) constitue l’une des innovations les plus radicales permises par la technologie blockchain. Elle a le potentiel de transformer durablement les infrastructures et le fonctionnement du système financier mondial.

Depuis son essor à l’été 2020, l’écosystème de la DeFi s’est développé à un rythme exponentiel avec comme but affiché d’être une alternative aux services financiers traditionnels (TradFi). La DeFi porte la promesse d’être totalement automatisée, décentralisée et désintermédiée. Elle repose clairement sur l’utilisation des protocoles blockchain et de crypto-actifs.

Actuellement, le domaine de la DeFi évolue en dehors des périmètres établis par les réglementations nationales françaises et européennes, et plus particulièrement le règlement de l’Union européenne sur les marchés de crypto-actifs (MiCa) (PE et Cons. UE, règl. 2023/1114, 31 mai 2023). A cet égard, les articles 140 et 142 du règlement prévoient que la Commission européenne devra présenter une évaluation du développement de la DeFi et une évaluation de la nécessité et de la faisabilité de réglementer la DeFi.

Afin de préempter les futurs débats au niveau de l’Union européenne, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) et l’Autorité des marchés financiers (AMF) ont successivement consulté les membres du secteur sur l’opportunité de mettre en place un cadre national juridique ad hoc sur la DeFi.

Dernièrement, en septembre 2023, l’ACPR a publié une synthèse des réponses à la consultation publique aux termes de laquelle elle a présenté des pistes de réglementation : fixation de standards de sécurité pour les blockchains publiques, gestion par des autorités publiques de noeuds d’archives pour certaines blockchains publiques, certification des smart contracts, encadrement des intermédiaires ou des interfaces, etc. Il est également probable que l’AMF contribue prochainement au débat en publiant également une synthèse des réponses à sa propre consultation.

Au-delà de ces réflexions préliminaires, il conviendra également de s’interroger sur les standards requis en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (KYC./AMI.), la responsabilité des acteurs en cas de piratage, l’appréhension juridique des organisations autonomes décentralisées (DAO) et la protection des consommateurs.

Dans la recherche de la réponse réglementaire appropriée, le législateur et les autorités compétentes devront bien garder en tête les enjeux de la compétitivité et de la souveraineté français et européens. Bien que l’objectif de mettre en place un cadre juridique soit parfaitement louable, l’écosystème de la DeFi est tellement international que des phénomènes d’arbitrage juridictionnel pourront aisément être mis en oeuvre. Ainsi, une réglementation trop lourde ou punitive n’aura d’autres effets que de provoquer un exode des talents français, en premier lieu ingénieurs et développeurs, vers des juridictions plus amicales.

Dans le même sens, l’écosystème de la DeFi est encore très modeste en termes de valeur et volume par rapport à la TradFi et les cas d’usage ne sont pas encore pleinement stabilisés. Il faut donc se retenir de réglementer dans la précipitation un secteur en constante évolution sur le plan technologique.

En conclusion, nous ne pouvons que louer les initiatives récentes des régulateurs français qui s’emparent du sujet, mais il faut en parallèle insister pour que les réflexions et débats en cours promeuvent une approche prudente et proportionnée permettant de trouver cet équilibre délicat entre innovation technologique et protection des utilisateurs.

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