Retraites chapeaux, montant des rémunérations, départ à l’étranger des sièges sociaux, etc. la fiscalité et le statut des dirigeants des (grandes) entreprises ne finissent pas d’attiser des critiques plus ou moins acerbes. Rappelons-nous le débat sur le plafonnement des rémunérations pour les mandataires sociaux des sociétés privées – qui n’a pas été le prolongement attendu du décret du 26 juillet 2012 sur celles des patrons des entreprises publiques – et convenons que les réflexions sur le statut de ces dirigeants restent suspendues… au prochain scandale. L’Afep-Medef a pourtant contribué à ce sujet en érigeant des règles de moralisation. De même, la procédure du « say on pay » a donné plus de visibilité sur la rémunération du patron. La quasi-totalité des packages a été dûment approuvée en assemblée générale en 2014, l’honneur est sauf. Le débat est-il donc clos ?
Il n’est, à dire vrai, pas entamé. Après avoir imposé à toute force la transparence pour les sociétés cotées et la création de plafonds pour les indemnités de départ des mandataires adossés à des critères de performances – curieux paradoxe en cas de révocation -, on a laissé le sujet en jachère.
Il serait judicieux de profiter de l’envie toute récente des Français de réformer le modèle actuel, en prétextant le cas des mandataires sociaux, pour renouer avec la notion de risque. Au fond, ce qui agace l’opinion, c’est l’impression que les patrons des grandes entreprises ne sont jamais mis en risque. Certes, ils n’ont plus le recours au contrat de travail pour la plupart, mais leur rétribution et les avantages annexes font grincer des dents. Il ne faut pas se tromper de combat. Fustiger les attributs et le quantum est un discours un peu sommaire qui revient à mettre en cause sinon leurs compétences, du moins leur utilité. C’est un peu court et injuste. Il faut conclure que c’est moins le montant de leur rémunération qui doit être critiqué que leur statut. A cheval entre celui du salarié, au plan fiscal et social, et du mandataire social, régi uniquement par le Code des sociétés, leur statut n’est pas clair. Ils ne sont pas pris en charge par Pôle emploi, et cette distorsion substantielle avec les salariés indique qu’il faut trancher. Salariés ou mandataires sociaux ? La deuxième option est la seule qui vaille. Sortir ces personnes du régime général de la Sécurité sociale et des traitements et salaires au plan fiscal les rendrait comparables à ce qui se pratique pour les titulaires de bénéfices non commerciaux. Il leur appartiendrait de contribuer eux-mêmes aux assurances sociales, à la retraite. Ainsi, échappant à la comparaison avec les salariés, ils seraient légitimes à percevoir une rémunération leur permettant de pourvoir à leur régime social et faire face à l’aléa de la cessation de leur mandat. Adopter un statut fiscal et social en tout point conforme à leur position au sommet de l’entreprise serait une réforme – simple – qui renforcerait le lien entre risque et montant des rémunérations.