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Rescrit fiscal : ouverture d’un recours

Le Conseil d’Etat vient d’ouvrir une nouvelle possibilité de recours en matière fiscale. Par une décision Société Export Press du 2 décembre 2016, il autorise un contribuable à former un recours contre la position prise par l’administration sur sa demande de rescrit fiscal.

Rappelons que la procédure de rescrit permet à un contribuable de demander à l’administration de prendre position, par avance, sur l’application d’un texte fiscal à sa situation. L’intéressé pourra ensuite se prévaloir de cette réponse dans le cadre de la procédure d’imposition.

Le rescrit contribue utilement à la sécurité juridique et à la prévisibilité du droit. Toutefois, si le contribuable ne partage pas l’analyse de l’administration, il n’a pas le droit de former un recours direct contre le rescrit. Le juge estime en effet qu’une telle prise de position n’a pas par elle-même d’effets juridiques et que le contribuable, s’il le souhaite, peut toujours contester in fine les impositions mises à sa charge, devant le juge de l’impôt.

Ce principe admet désormais une exception. Un rescrit peut faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir lorsque le fait pour le contribuable de s’y conformer « entraînerait des effets notables autres que fiscaux » et qu’ainsi, le recours devant le juge de l’impôt ne lui permettrait pas d’obtenir des résultats équivalents. La décision fournit des illustrations de cette hypothèse : il en va ainsi lorsque le fait de se conformer à la prise de position de l’administration « aurait pour effet, en pratique, de faire peser sur le contribuable de lourdes sujétions, de le pénaliser significativement sur le plan économique ou encore de le faire renoncer à un projet important pour lui ou de l’amener à modifier substantiellement un tel projet ». En outre, les rescrits défavorables pris dans certains domaines spécifiques, tels que les rescrits « crédit d’impôt recherche » ou « établissement stable », sont, compte tenu des enjeux économiques qui motivent les demandes, réputés par principe pouvoir faire l’objet d’un tel recours. En pratique, avant de saisir le juge, le contribuable devra demander à l’administration de procéder à un second examen de sa situation.

Ainsi, le champ des possibles apparaît largement ouvert aux contribuables avertis.

On doit se féliciter du souci de réalisme qui transparaît dans la jurisprudence économique du Conseil d’Etat. Avec les décisions Fairvesta et Numéricable du 21 mars 2016, la Haute juridiction avait déjà admis une possibilité de recours contre les actes de droit souple des autorités de régulation, tels que les communiqués de presse, compte tenu de leurs effets notables « notamment de nature économique ». La décision Société Export Press s’inspire de la même volonté de pragmatisme : même si, sur le plan juridique, un rescrit ne comporte pas par lui-même de décision, ses effets pratiques sont parfois considérables. Il n’était pas sain de faire échapper de tels actes au contrôle du juge.

Yann AGUILA, Yves RUTSCHMANN
et Pierre-Marie ROCH
Avocats au barreau de Paris, Bredin Prat

Yann Aguila

Yann Aguila

Avocat à la Cour, Bredin Prat
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