Des entreprises s’engagent en faveur de l’allongement du congé du second parent.
Leetchi, BlablaCar, Joone, Mon Docteur, Ami, au total ce sont 105 entreprises représentant plus de 19.000 salariés qui ont signé un « Parental Act » au mois de février dernier. Elles s’engagent à garantir un congé d’un mois minimum intégralement rémunéré pour le second parent. Un succès, puisque deux mois après son lancement, 197 nouvelles entreprises signaient le « Parental Act ». Aujourd’hui de 11 jours, l’allongement du congé paternité ou d’accueil de l’enfant favoriserait notamment, selon les signataires, la construction durable du lien père-enfant et l’égalité professionnelle femmes-hommes en France.
En dressant ce même constat, l’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) a également proposé de porter le congé paternité ou d’accueil de l’enfant à 4 semaines.
Les français plébiscitent aussi l’allongement du congé paternité ou d’accueil puisque 70% des parents d’enfants de moins de trois ans utilisent ce congé alors même qu’il est optionnel et rémunéré partiellement par l’Assurance-maladie.
Toutefois, les avancées législatives demeurent timides depuis la création du congé paternité en 2002 en comparaison à nos voisins européens.
En Espagne, le second parent bénéficie de 8 semaines de congés depuis le 1er avril 2019 et il est rémunéré intégralement. En Suède, les deux parents se partagent près de 480 jours de congés payés à hauteur de 80 % du salaire. La Finlande réserve quant à elle 54 jours de congés payés avec un maintien intégral de salaire pour le père à la naissance d’un enfant.
Le congé paternité ou d’accueil de l’enfant en France fait ainsi pâle figure et l’état de la situation du congé parental ne permet guère de dire mieux.
Celui-ci permet de réduire ou cesser son activité professionnelle pour s’occuper de son enfant de moins de 3 ans pour une durée d’un an renouvelable. Le parent ne perçoit toutefois qu’une simple compensation forfaitaire de 396 euros par mois.
Même s’il est ouvert aux deux parents, en pratique, dans les couples hétérosexuels, 96 % des congés parentaux sont pris par les mères. Le salaire des femmes étant en moyenne de 25,7% moindre que celui des hommes, le manque à gagner pour le foyer est moins important qu’en cas de prise de congé par le père. Ces conditions n’encouragent donc nullement le second parent et notamment le père à s’arrêter de travailler pour s’occuper plusieurs mois de son enfant. Elles ont également pour effet de peser négativement sur les parcours d’emploi (embauche, rémunération, carrière…) des femmes qui décident de prendre un congé parental.
Dès lors, pour promouvoir l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, il apparaît indispensable que ce que l’IGAS qualifie de risque de « parentalité » soit un partage plus équitable entre le père et la mère.
Pour l’instant, la France se montre particulièrement frileuse à réformer tant le congé paternité et d’accueil que le congé parental en raison de la question épineuse du coût d’une telle réforme.
Un allongement du congé paternité et d’accueil de l’enfant pour le porter à 6 semaines entraînerait un surcoût de 1,2 milliards d’euros pour la Caisse Nationale d’Allocations Familiales.
Pour les mêmes raisons budgétaires, la France s’est montrée réfractaire à la version initiale de la directive européenne pour l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Le projet de directive prévoyait un congé parental de quatre mois pour chaque parent, non transférables de l’un à l’autre, et rémunérés au moins à hauteur des indemnités maladie de leur pays. Le coût de ces mesures a été évalué à 1,6 milliards d’euros par la France qui s’y est opposée devant le Parlement européen.
Si le législateur peine à réformer, les entreprises innoveront sans nul doute elles-mêmes pour répondre aux attentes de leurs salariés et de la société. Le « Parental Act » initie cette dynamique.
Par Marie-Hélène Bensadoun et Ghislaine Zaïdi, Avocates AUGUST DEBOUZY AVOCATS, partenaire du Club des juristes.