Le Club des juristes, premier think-tank juridique français, publie aujourd’hui un rapport intitulé « Responsabilité civile des administrateurs et dirigeants en matière de durabilité et de vigilance ».
Ce rapport est le fruit des travaux d’une commission du Club des juristes présidée par Didier Martin, avocat associé au cabinet Bredin Prat. Cette réflexion a été coordonnée et animée par Olympe Dexant-de Bailliencourt, Professeure agrégée de droit privé.
LA RESPONSABILITÉ CIVILE DES DIRIGEANTS ET ADMINISTRATEURS EN MATIÈRE DE DURABILITÉ ET DE VIGILANCE
Ce rapport se penche sur les implications croissantes pour les administrateurs et dirigeants d’entreprises quant à leur responsabilité civile dans les domaines de la durabilité et de la vigilance. En particulier, il analyse les effets potentiels de la directive sur la publication d’informations en matière de durabilité (Corporate Sustainibily Reporting Directive ou CSRD) et de la loi sur le devoir de vigilance de 2017, renforcée par une directive sur le devoir de diligence en matière de durabilité, qui pourraient indirectement étendre la responsabilité civile des dirigeants.
VERS UNE EXTENSION DU CHAMP DE LA RESPONSABILITÉ PERSONNELLE
La CSRD, transposée en droit national en décembre 2023, comme la directive sur le devoir de diligence en matière de durabilité adoptée par le Parlement européen et le Conseil le 13 juin 2024 suscitent l’inquiétude des administrateurs et dirigeants qui redoutent une possible extension du champ de leur responsabilité personnelle du fait de l’introduction de nouvelles obligations en matière de durabilité. Cette inquiétude est d’autant plus nourrie par le développement des actions en justice, particulièrement celles menées par des actionnaires activistes.
DES OBLIGATIONS NOUVELLES VISANT LA MINIMISATION DES RISQUES
Du fait de ces nouvelles dispositions, administrateurs et dirigeants seront tenus d’adopter et de mettre en œuvre un système fondé sur les risques pour suivre, prévenir ou réparer les dommages aux droits de l’homme ou à l’environnement. Les conseils d’administration devront ainsi superviser et valider l’élaboration de plans de vigilance et de rapports de durabilité, en cohérence avec le modèle d’affaires de l’entreprise. Ces exigences accroissent naturellement les responsabilités des dirigeants sans pour autant modifier fondamentalement les critères de mise en cause de leur responsabilité civile.
UN CADRE JURIDIQUE MAINTENU, MAIS RENFORCÉ
Le triptyque classique faute – préjudice – lien de causalité est maintenu et la typologie des fautes des dirigeants n’a pas été modifiée par la loi sur le devoir de vigilance ou la transposition de la CSRD. Toutefois, le rapport note que les risques de contentieux augmentent, notamment pour les entreprises qui ne respectent pas leurs obligations de publication en matière de durabilité ou de vigilance. En ce sens, les dirigeants peuvent être tenus responsables en cas de défaut de contrôle ou de mise en œuvre effective des plans de vigilance. Ce risque est particulièrement présent dans les contentieux liés à la publication de plans incomplets ou non conformes.
VERS UNE FORMALISATION DE LA « DILIGENCE DU DIRIGEANT »
Le rapport anticipe la création d’un nouveau standard jurisprudentiel autour du concept de « dirigeant diligent » en matière de durabilité et de vigilance. Ce « dirigeant diligent » se forme, s’informe et prend les mesures adéquates pour respecter ces nouvelles obligations, de manière à pouvoir s’exonérer de sa responsabilité en cas de contentieux.
L’extension des responsabilités civiles des administrateurs et dirigeants en matière de durabilité et de vigilance, bien que limitée par les principes actuels de la responsabilité civile, marque un tournant vers une gestion plus rigoureuse et responsable des enjeux durables. Le renforcement des formations et la collaboration avec des experts externes sont fortement recommandés pour anticiper ces nouvelles exigences.
Retrouvez ici le rapport ainsi que le dossier de presse.