Le 10 mai 2018, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté à une très large majorité une résolution ouvrant la voie à la négociation d’un Pacte mondial pour l’environnement. Ce traité international regrouperait dans un texte unique les grands principes juridiques qui guident l’action environnementale. Depuis plus de trente ans, la communauté internationale des juristes appelle les Etats à l’adoption d’un tel texte, depuis les experts juridiques du rapport Brundtland de 1987 jusqu’au projet de Pacte sur l’environnement et le développement de l’UICN de 1995 et au projet élaboré en 2017 par un groupe d’experts, composé d’une centaine de juristes issus de 40 pays du Sud et du Nord, représentant toutes les traditions juridiques.
En 2015, l’adoption des Objectifs de développement durable et de l’Accord de Paris sur le climat a créé une dynamique mondiale nouvelle en faveur de la protection et de la conservation de l’environnement. Ces textes ont marqué des avancées majeures. Toutefois, les atteintes à l’environnement persistent et sont même d’une gravité sans précédent. Les années 2017 et 2018 ont été marquées par des températures record. La biodiversité continue de se dégrader à grande vitesse. Il est nécessaire de franchir une nouvelle étape. Au delà de la question du climat, le besoin se fait sentir d’un texte plus global, fixant les principes directeurs de la gouvernance mondiale de l’environnement.
Avec le Pacte mondial pour l’environnement, la communauté internationale se doterait pour la première fois d’un traité à caractère général, couvrant l’ensemble des domaines de l’environnement. Pierre angulaire du droit international de l’environnement, le Pacte constituerait un « umbrella text » permettant de créer un lien entre les différents traités sectoriels existants (climat, biodiversité, déchets, pollution, etc). Le Pacte n’entend pas se substituer à ces textes. Au contraire, il vise à les compléter et à en faciliter la mise en œuvre. Il pourrait ainsi combler leurs lacunes ou encore s’appliquer cumulativement à eux, lorsqu’il n’y a pas d’incompatibilité, afin de leur donner davantage d’effectivité et d’efficacité.
S’agissant de son contenu, ce nouveau traité refléterait les principes environnementaux partagés par la plupart des constitutions dans le monde et consacrés dans certains textes internationaux importants mais sans valeur juridique, comme la Charte mondiale de la nature de 1982 ou la Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement de 1992. Il bénéficierait à tous les acteurs de la gouvernance de l’environnement, en rassemblant de façon systématique, en tant que socle minimal, les dispositions internationales, constitutionnelles et législatives déjà existantes dans de nombreux pays. Dans chaque Etat, le législateur y trouverait des références pour l’adoption de lois plus protectrices de l’environnement. Les Cours suprêmes y puiseraient une inspiration commune pour consolider, dans le cadre d’un dialogue entre les juges, les fondements d’un droit global de l’environnement. Les citoyens et les ONG verraient leurs droits environnementaux renforcés. Les entreprises tireraient parti de cette harmonisation des règles du jeu au plan mondial, qui favoriserait une plus grande sécurité juridique et des conditions de concurrence équitables.
Alors que sont célébrés les soixante-dix ans de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, et cinquante ans après l’adoption des deux Pactes internationaux de 1966, relatifs l’un aux droits civils et politiques et l’autre aux droits économiques, sociaux et culturels, le moment est venu de franchir une nouvelle étape dans l’histoire du droit international. C’est pourquoi nous appelons à l’adoption d’un troisième Pacte consacrant une nouvelle génération de principes fondamentaux : les droits et devoirs relatifs à la protection de l’environnement.
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La version anglaise de l’Appel est disponible ici
Yann Aguila, président de la Commission Environnement du Club des juristes, Antonio Herman Benjamin, juge à la Haute Cour nationale du Brésil, président de la Commission mondiale du droit de l’environnement de l’UICN, Laurent Fabius, ancien président de la COP 21, Bruce Ackerman, Sterling professeur de droit et de sciences politiques, Ecole de droit, Université de Yale, Laurence Boisson de Chazournes, professeure, Université de Genève, David Boyd, professeur de droit, de politique et de développement durable, Université de la Colombie-Britannique, rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits de l’homme et l’environnement, Lord Robert Carnwath, juge à la Cour suprême du Royaume Uni, Parvez Hassan, avocat à la Cour suprême du Pakistan, président émérite de la Commission mondiale du droit de l’environnement de l’UICN, Marie Jacobsson, ancienne membre de la Commission du droit international des Nations Unies de 2007 à 2016 et rapporteur spécial, Donald Kaniaru, ancien directeur de la mise en œuvre environnementale au PNUE, Swatanter Kumar, ancien juge à la Cour suprême indienne, ancien président du National Green Tribunal indien, Luc Lavrysen, juge à la Cour constitutionnelle de Belgique, président du Forum européen des juges pour l’environnement, professeur en droit de l’environnement, Université de Gand, Pilar Moraga Sariego, professeure au Centre du droit de l’environnement, Faculté de droit, Université du Chili, directrice du groupe de recherche sur la dimension humaine au Centre de Recherche sur le Climat et la Resilience (CR)2, Tianbao Qin, professeur, Université de Wuhan, secrétaire général de la Société chinoise de droit de l’environnement et des ressources naturelles, Nicholas A. Robinson, professeur à l’Ecole de droit Elisabeth Haub, Université de Pace, New York, chef exécutif du Centre d’études mondial pour le droit de l’environnement, Jorge E. Vinuales, professeur, Université de Cambridge, président du Comité d’examen du respect des dispositions du Protocole sur l’eau et la santé de la CEE-ONU/OMS-Europe, Margaret Young, professeure associée, Faculté de droit, Université de Melbourne, Pauline Abadie, Maître de conférences en droit, Université Paris Saclay, Domenico Amirante, professeur titulaire de droit comparé et de droit de l’environnement, directeur de l’Ecole doctorale de droit comparé, département de Sciences Humaines, Université « Luigi Vanvitelli », Marisol Angles Hernandez, docteure en droit de l’environnement, chargée de recherches à l’Institut pour la recherche juridique, Université nationale autonome du Mexique (UNAM), Dr. Virginie Barral, professeure associée de droit international, Université d’Hertfordshire, Mishig Batsuuri, président de la Chambre administrative, Cour suprême de Mongolie, Ben Boer, professeur distingué, Institut de recherche sur le droit de l’environnement, Université de Wuhan, professeur émérite, Faculté de droit, Université de Sydney, ancien vice-président de la Commission mondiale du droit de l’environnement de l’UICN, Klaus Bosselmann, professeur, Université d’Auckland, président du Groupe d’experts sur l’éthique de la Commission mondiale du droit de l’environnement de l’UICN, président de l’Association du droit et de la gouvernance écologique, Simone Borg, experte juridique en droit international, présidente de l’Institut pour le changement climatique et le développement durable, chef du département du droit de l’environnement et du droit des ressources, professeure auxiliaire de droit international, Université de Malte, Ioana Botezatu, fonctionnaire internationale – Sécurité Environnementale, Michael Bothe, professeur émérite de droit public, Université Goethe de Francfort, ancien président de l’Association européenne du droit de l’environnement, ancien vice-président de la Commission mondiale du droit de l’environnement de l’UICN, Thomas Boudreau, professeur interdisciplinaire, Université de Salisbury, Maryland, Edith Brown Weiss, Francis Cabell Brown professeure de droit international, Centre de droit, Université de Georgetown, Soukaina Bouraoui, directrice du Centre des femmes arabes pour la formation et la recherche, Stefano Burchi, président du Conseil exécutif de l’Association internationale pour le droit des ressources en eau, Mingde Cao, professeur, Université chinoise de Sciences politiques et de droit, Joëlle Casanova, ancienne directrice des affaires juridiques et administratives de la Fondation Albert II de Monaco, Fernando Carillo Florez, inspecteur procureur général de Colombie, Nathalie Chalifour, professeure agrégée, Centre du droit de l’environnement et de la durabilité mondiale, Faculté de droit, Université d’Ottawa, Leila Chikhaoui, professeure en droit public, Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales, Tunis, membre de l’Instance provisoire de contrôle de la constitutionnalité des projets de loi…