« L’arbitrage appartient au passé, au présent et à l’avenir. Ce qui frappe en lui, c’est sa permanence » [1].
Ce constat, posé il y a près de 20 ans, est plus que jamais d’actualité.
Son passé trouve en effet ses racines dans la très haute Antiquité puis durant l’Empire romain, l’Ancien droit, la Révolution française avant que la notion n’intègre le code de procédure civile de 1806. Cette forme alternative de règlement des différends, offrant un partage de l’activité de juger, fut ainsi très tôt appréciée par ses promoteurs pour sa rapidité, sa discrétion et sa souplesse.
Malgré tout, le droit de l’arbitrage a été à remanié à plusieurs reprises, tant et si bien qu’en dépit d’une continuité avec l’arbitrage antique, l’arbitrage contemporain est devenu une notion complexe au confluent du droit des contrats, du droit processuel, du droit des affaires, du droit international, et même du doit public.
À l’heure où l’open data, les algorithmes, l’intelligence artificielle et les legal tech s’invitent de plus en plus dans la scène judiciaire, on assiste à un tournant dans les pratiques professionnelles des différents acteurs du droit. Plusieurs études interrogent actuellement l’incidence de ces technologies sur la fonction de juger et plus généralement sur le procès. Pourtant, force est de constater que les modes alternatifs de règlement des différends ne sont guère épargnés et que le recours aux « cyber-arbitres » doit lui aussi s’inscrire dans cette réflexion, d’ordre plus général.
Du dépôt de la demande à la reddition de la sentence arbitrale, la « dématérialisation » est ainsi à présent aussi une réalité de l’arbitrage. La possibilité aujourd’hui ouverte de mener un arbitrage intégralement « en ligne » soulève de nombreuses questions, non seulement quant au droit de l’arbitrage lui-même – interne mais aussi international – mais aussi eu égard à ses rapports avec le droit du numérique ou encore avec le droit des propriétés intellectuelles, et même le droit du procès. Plus généralement, il semble que ce soit une réflexion sur la justice qui doive être menée, à l’heure où le gouvernement annonce d’ailleurs une transformation en profondeur de la justice civile.
Pour aborder ce thème particulièrement ambitieux et prometteur, une Commission sur « L’arbitrage en ligne » a ainsi été instituée à l’initiative du Club des juristes et sera dirigée par le professeur Thomas Clay.
[1] L. Matray, « Quelques problèmes de l’arbitrage commercial international (doctrine et jurisprudence) », in L’arbitrage, Mélanges Albert Fettweis. E. Story-Scientia, Bruxelles, 1989, p. 289, spéc. n° 286