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TEG erroné

De la nullité vers une sanction seulement éventuelle et proportionnée ?TEG

Les Tribunaux sont submergés par les actions en contestation de l’exactitude du TEG, dont les demandeurs attendent une remise de l’intégralité des intérêts dont sont assortis leurs crédits immobiliers. TEG

Initialement, la coexistence des deux sanctions que sont la déchéance du droit aux intérêts et la nullité de la stipulation d’intérêts conventionnels trouvait sa source dans le schéma de formation d’un contrat de crédit immobilier. En cas de TEG erroné dans l’offre de prêt, la sanction est celle prévue expressément dans le Code de la consommation, soit la déchéance du droit aux intérêts, en tout ou partie dans les proportions fixées par le juge. En revanche, en cas de TEG erroné dans l’acte authentique de prêt, la Cour de cassation, par référence aux dispositions de l’article 1907 du Code civil, retient la nullité du taux conventionnel auquel doit être substitué le taux légal.

Cette construction prétorienne a donné lieu à une inflation d’actions judiciaires destinées à jouer opportunément des règles de la prescription antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile et du régime de sanction applicables en la matière.

Il est apparu un temps plus opportun d’agir en nullité de la stipulation d’intérêts conventionnels les cinq années suivant la conclusion du prêt et en déchéance du droit aux intérêts les cinq années suivantes. Quitte à revenir à la nullité après dix ans, en tentant de faire décaler le point de départ de la prescription. La stratégie des emprunteurs avisés pouvait également être guidée par la sanction applicable : en cas d’erreur alléguée minime, l’action en nullité était favorisée afin d’échapper au pouvoir modérateur du juge en matière de déchéance du droit aux intérêts. Inversement, en cas d’erreur alléguée grossière, c’est l’action en déchéance totale du droit aux intérêts qui avait les faveurs des emprunteurs dès lors qu’une action en nullité laissait à ces derniers l’obligation de payer les intérêts au taux légal.

Désormais, quel que soit son fondement juridique et peu importe qu’il s’agisse d’une erreur purement mathématique ou consécutive au défaut d’inclusion de frais dans le TEG, la contestation se prescrit par cinq ans à compter de l’acceptation du prêt dès lors que ses éléments intrinsèques permettaient à l’emprunteur de déceler l’erreur alléguée.

Par ailleurs, les Cours d’appel de Montpellier et de Paris excluent désormais la nullité au profit de la déchéance du droit aux intérêts, seule sanction applicable en la matière.

D’une part, la coexistence des deux sanctions est malvenue en raison du principe lex specialia generalibus derogant d’autant plus qu’elle ne participe pas à l’unique objectif recherché par le législateur, à savoir donner au TEG une fonction comparative.

D’autre part, ce régime est contraire à la Directive n°2014/17/UE du 4 février 2014 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel, désormais transposée en droit français, imposant que les sanctions soient « proportionnées ». En effet, puisque la sanction est fondée sur l’absence de consentement au coût global du prêt, celle-ci ne devrait être prononcée qu’à proportion de l’erreur commise au détriment de l’emprunteur et ne devrait entrainer que la réduction du coût du prêt au TEG auquel l’emprunteur a valablement consenti, sans substitution du taux de l’intérêt légal au taux d’intérêt contractuel régulièrement accepté. Or, la nullité emporte des effets disproportionnés puisqu’elle prive la banque de l’intégralité des intérêts conventionnels qu’elle reçoit en échange des fonds mis à disposition et du risque qu’elle a pris à les prêter.

La Cour de cassation refuse d’ailleurs de prononcer la nullité lorsque l’écart entre le TEG mentionné et le TEG réel n’excède pas une décimale ou dès lors que l’emprunteur argue d’un TEG inférieur à celui qui est stipulé dans l’acte de prêt, de sorte que l’erreur alléguée ne vient pas à son détriment.

Par l’effet d’un retour à deux principes fondamentaux du droit que sont celui selon lequel la loi spéciale déroge à la loi générale ainsi que celui de la proportionnalité de la sanction, le contentieux relatif au TEG devrait s’alléger des multiples actions à effet d’aubaine recherché par les plaideurs – de minimis non curat praetor – pour mieux concentrer son efficacité sur l’erreur significative et réellement préjudiciable à l’emprunteur

 

Philippe Métais et Elodie Valette, Avocats – White & Case, Partenaire du Club des juristes

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